Ce billet est mis à jour régulièrement, sous forme de notes ou d'ajouts dans le texte. Les critiques et contributions sont les bienvenues. Pour suivre les mobilisations et les évènements au quotidien, voir des pages facebook, dont la mienne. Des liens permettent d'accéder facilement à des propositions alternatives élaborées par des associations et des collectifs. Les contribution du PCF, depuis une dizaine d'années, sont publiées sur son site national. Le texte "Migrations, le monde en mouvement", adopté par le congrès de 2006 du PCF, reste une référence qui doit être actualisée. L'Humanité publie régulièrement articles et reportages de qualité .
sur le stand du PCF 92 à la fête de l'Humanité pour une rencontre fraternelle |
Voici
plusieurs années que la noyade est le sort, quand ce n’est pas l’asphyxie à
fond de cale, de milliers, de dizaines
de milliers d’hommes , de femmes et d’enfants qui tentent la traversée de la
Méditerranée, devenue un véritable cimetière marin. Personne ne peut dire
« Je ne savais pas » : les médias en publient régulièrement le
spectacle, le plus souvent quand des survivants sont sauvés. De temps en temps,
les souffrances, les blessures, les décès dans les déserts, contre les murs de
barbelés, sont évoqués. Mais ces mises à mort-là se passent le plus souvent
plus loin de chez nous, car des frontières sont gardées, de l’autre côté de la
Méditerranée, par des Etats inféodés pour le faire, sous le chantage d’aides de
riches pays d’Europe, qui ne profitent en fait qu’aux dirigeants de ces pays complices.
Quand les phobies tuent la solidarité
humaine…
Voici
plusieurs mois qu’au plus haut niveau de l’Union Européenne, les chefs d’Etat
et de gouvernement, réunis en « sommets », et la Commission, s’inquiètent.
Les passeurs sont les responsables désignés à l’opinion : des sommes considérables
sont consacrées à renforcer l’armada de guerre contre eux, et il est question
de les pouchasser jusqu’en Lybie. Puis des propositions sont faites pour que l’accueil
soit réparti par quotas entre tous les Etats, ce que les dirigeants de la
plupart d’entre eux, dont le gouvernement français, refusent immédiatement. C’est sur les côtes d’Italie et
de Grèce que débarquent des milliers de réfugiés, que ces pays se débrouillent !
Gendarmes et policiers ferment le sas avec les pays du sud de l’Europe, de
nouveaux murs s’érigent, aux frontières hongroises ou turques… FRONTEX perfectionne ses nouvelles
technologies anti-migrants tout autour de l’ « Europe Forteresse ».
Plus le passage est « clandestin » et difficile, plus les risques
pris sont grands, plus prolifèrent les
mafias, pour lesquelles le passage et la force de travail des réfugiés et migrants
ne sont que des marchandises, plus le nombre de vies détruites augmente.
Des
associations, des forces politiques, notamment la Gauche Unie Européenne et Les
Verts, dénoncent les mesures prises par l’Union Européenne et par la France comme
inefficaces et même criminelles. Mais nous n’étions guère nombreux à nous
rassembler, à manifester notre douleur et notre solidarité, notre indignation, ce
printemps et cet été, même si le nombre d’organisations signant ou soutenant
des appels comme Des ponts
pas des murs est devenu significatif.
Toutes les propositions, même celles qui ne visent qu’à répondre à l’urgence humanitaire, et seraient possibles à mettre en place sans bouleverser les politiques migratoires de l’Union européenne et des Etats européens, paraissent irréalistes et dangereuses pour la majorité de l’opinion. La hantise de l’ouverture des frontières, la phobie d’être « envahis », ont été ancrées, pas seulement par les abjectes provocations du Front national et de la droite extrêmisée, mais aussi par les discours et la politique de ceux, qui, aujourd’hui au pouvoir, ne rompent pas avec les désastres du Sarkozysme. L’arrivée de « boat peoples » serait un danger qui nous menacerait ? C’est le premier mensonge à dénoncer.
Toutes les propositions, même celles qui ne visent qu’à répondre à l’urgence humanitaire, et seraient possibles à mettre en place sans bouleverser les politiques migratoires de l’Union européenne et des Etats européens, paraissent irréalistes et dangereuses pour la majorité de l’opinion. La hantise de l’ouverture des frontières, la phobie d’être « envahis », ont été ancrées, pas seulement par les abjectes provocations du Front national et de la droite extrêmisée, mais aussi par les discours et la politique de ceux, qui, aujourd’hui au pouvoir, ne rompent pas avec les désastres du Sarkozysme. L’arrivée de « boat peoples » serait un danger qui nous menacerait ? C’est le premier mensonge à dénoncer.
Non, ce n’est pas
« un appel d’air » venu d’Europe qui expliquerait le – très relatif -
afflux de réfugiés qui parvient jusque « chez nous » !
Depuis
plusieurs années, le nombre de personnes qui ont fui leur pays augmente. Elles
étaient 11,7 millions dans le monde en 2013, recensées par le Haut Commissariat aux
Réfugiés de l’ONU . Ces réfugié-e-s survivent pour la moitié d’entre elles et d’entre eux en Asie, et pour presque un tiers en AfriqueLes guerres sont les premières causes de leurs exodes. Il faut ajouter les 5 millions de Palestiniens qu’abritent une soixantaine de camps au Moyen Orient. D'autres sources avancent le nombre de 60 millions de réfugiés dans le monde. Leurs exodes, momntanés ou définitifs, s’arrêtent pour la
très grande majorité dans les pays limitrophes, eux-mêmes souvent pauvres et instables C'est une petite minorité qui a les moyens de tenter d'arriver en Europe. Par exemple, en 2015, sur les 4 millions de réfugiés syriens, le Liban en accueille 1,5 millions, soit le
tiers de la population libanaise. Les Syriens ne sont que 270 000 à avoir
fait une demande d’asile en Europe ces dernières années, très peu en France,
pays qui refuse de les accueillir.
Le pillage
des ressources, les guerres, les dictatures, dont les politiques colonialistes
et impérialistes sont les premières responsables, ont mis des contrées entières
à feu et à sang. Le nombre de réfugiés et de migrants augmente : comment
s’en étonner ? Ce qui doit nous inquiéter, c’est que ceux qui gouvernent
en notre nom continuent les mêmes politiques, et prétendent repousser quelques
centaines de milliers de leurs victimes, qui risquent leurs vies en Méditerranée et
contre tous les murs de l’ « Europe forteresse ».
216 300
d’entre eux sont parvenus à déposer une demande d’asile en 2014 dans un pays de
l’Union Européenne, qui compte 514 millions d’habitants. En France, la même
année, seulement 14 589, sur les 45 454 adultes qui l’avaient
demandé, sans compter leurs 13 845 enfants, ont obtenu
un statut de réfugié. Certes, le nombre augmente. 100 000 migrants
et réfugiés ont atteint les côtes de la Grèce et de l’Italie entre janvier et
juin. La Macédoine, la Serbie...sont débordées par des afflux de réfugiés dans la dernière semaine d'août. L'allemagne s'alarme. Mais on est loin d’une « invasion » : il faut en finir avec une
législation européenne qui assigne, ou condamne à l’enferment et à
l’expulsion, le demandeur d’asile dans le premier pays où il est
« contrôlé ».(2.bis) (4) Ainsi, répartir l’accueil entre les Etats, et –
pourquoi pas – laisser le réfugié choisir
le pays où il veut reconstruire sa vie, apporter son savoir et son travail, serait
possible, et une répartition des fonds d’aides de l’UE (2,5 milliards annoncés
début août) serait vraiment utile.
Non au racisme et à la xénophobie
Rien ne saurait justifier l'expulsion brutale de campements de migrants et réfugiés à Paris les indignes conditions de survie des 3000 de Calais les refoulements illégaux vers l'Italie à Vintimille.... |
La loi sur le droit d’asile, comme celle sur les « droits des étrangers », dénoncée par un très large collectif d’associations (1), mais votée par le PS à l’Assemblée nationale, ne résolvent rien. Elles ne font que renforcer les dispositifs d’ « éloignement » du territoire, ce que confirme la circulaire du 22 juillet. (2) Depuis 2012, pas plus pour les demandeurs d’asile (2), que pour les travailleurs sans papiers présents depuis des années, que pour les jeunes lycéens, pour les mineurs étrangers isolés, les personnes voulant rejoindre leurs familles, rien n’a changé, sinon en pire, du côté du gouvernement.
Dans le
contexte actuel, c’est la situation de tous les travailleurs immigrés, en situation régulière ou pas, et celle de
leurs enfants, qui sont rendues encore
plus difficiles. Les pouvoirs publics font preuve d’une incapacité et d’un
manque de volonté politique pour accueillir les migrants et réfugiés en
détresse qui parviennent à atteindre nos villes. Ceux qui sont arrivés depuis
plus longtemps sont eux aussi désignés comme envahisseurs et boucs émissaires.
L’amalgame banalisé par la droite et son extrême, les désigne comme d’ « inassimilables »
étrangers, impossibles à « intégrer ». Les enfants et petits enfants
d’immigrés, qui sont français, surtout s’ils n’appartiennent pas aux couches
sociales privilégiées, s’ils vivent dans des quartiers populaires, s’ils
souffrent du chômage, des discriminations, de l’exclusion, sont mis dans le
même sac. Stigmatisés à cause de leur culture, de leur religion d’origine,
réelle ou supposée – l’islamophobie est devenue une des pires formes du racisme
– ils sont présentés comme des dangers pour notre « identité
nationale », notre sécurité...Des politiciens se lâchent, passant du
banalement raciste « on n’est plus chez nous » à l’appel à l’épuration
ethnique : comment comprendre autrement la proposition de revenir au droit
du sang, pour l’accès à la nationalité française ? L’air mauvais du temps
est aux antipodes des espoirs soulevés par les mobilisations pour le droit de
vote à tous les résidents, promesse abandonnée sans combat ni « pédagogie »
par Hollande, même pour les municipales. D’ailleurs, il sera encore plus
difficile de l’obtenir, la carte de résident (1) !
Plus que
jamais, la lutte solidaire avec les réfugiés et les migrants, pour la
régularisation des sans- papiers, et la lutte contre le racisme, contre les
discriminations que subissent ceux, qui bien qu’installés parmi nous, sont
toujours considérés comme des étrangers indésirables, sont à mener de front.
(3)
Ni la dérive du PS, ni les ignominies
de la droite « lepénisée », n’empêchent, heureusement, les luttes
solidaires.
Ainsi, dans
les Hauts-de-Seine, des collectifs rassemblant des centres sociaux, des
associations, des citoyens engagés – ou pas – au NPA, à EELV ou au Front de
gauche, se sont constitués pour aider des réfugiés hébergés à Colombes, Nanterre ou Clichy. RESF ne lâche
rien, pour qu’à la rentrée tous les enfants, tous les jeunes soient présents,
qu’eux et leurs familles aient des papiers. Plusieurs centaines de travailleurs
sans papiers, dont des résidents du foyer de Courbevoie, mènent depuis deux
mois une grève, avec la CGT, et ils viennent
d’obtenir de premiers succès.
La fête de l’Humanité sera une occasion de
nous rencontrer, entre acteurs de ces luttes diverses et convergentes, de
reprendre et poursuivre le débat, pour qu’une politique humaine, avec et pour
les migrants, devienne possible.
(1)
Voir l’analyse critique de fond du projet de loi
gouvernemental voté à l’assemblée nationale en juillet, dont le site du GISTI donne une synthèse
et fournit tous les liens utiles. Non seulement la revendication phare d’une carte de
résident de 10 ans pour permettre de sortir de la précarité et une véritable insertion
sociale n’a pas été obtenue, mais pratiquement, aucune des remarques et
demandes d’amendement n’ont été prises en compte par la majorité des députés,
le ministre de l’Intérieur, suivi par les députés socialistes, préférant polémiquer avec la droite sur son terrain :
la fermeté dans l’expulsion des migrants en situation irrégulière. Il est allé
jusqu’à faire voter un amendement qui « légalise » l’enfermement des
enfants dans les centres de rétention administratifs ! La composition du
Sénat ne laisse rien présager de bon quant à la suite des travaux parlementaires,
prévus dès la rentrée.
Voir aussi le compte rendu du débat
au stand du PCF 92 lors de la fête de l’Humanité 2014, quelques semaines
après la publication de la première mouture du projet de loi.
(2)
La loi sur le droit d’asile
a été votée surtout pour se mettre en conformité avec les traités européens. L’accélération
des procédures (neuf mois au lieu de deux ans en moyenne) serait positive, comme l’accompagnement
des demandeurs devant l’OFPRA, ou la volonté affichée de garantir des
hébergements, si des moyens suivaient. Voir
l’interview d’Anicet Le Pors. Mais c’est surtout la facilitation des « éloignements
du territoire » des déboutés, qui est la principale préoccupation. La
circulaire du 21 juillet, censée répondre à l’urgence d’héberger les réfugiés à
Calais et à Paris, vise aussi et surtout
à systématiser les expulsions du territoire.
Un
débat et des avancées concernant la notion d’asile aurait été utile : les
textes actuels, obligeant chaque individu à prouver qu’il est personnellement
victime ou en danger ne permet guère de faire face à des situations de
massacres de masse. A tel point qu’actuellement l’administration hésite à expulser
vers des pays tels que le Soudan l’Erythrée ou le Bangladesh des déboutés devenus "sans papiers". Mais ce débat n’a
pas eu lieu.
D’autre
part, nombre de déboutés du droit d’asile ou de la protection subsidiaire
peuvent être régularisés pour d’autres motifs (famille ou travail). Sous la
pression de la droite, qui en fait son cheval de bataille, c’est l’automaticité
des reconduites à la frontière qui risque de prévaloir.
(2 bis) Sur l'Europe et le droit d'asile, une excellente note de ifri vient d'être publiée : pdfhttps://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/droitasile_tardis.pdf
(2 bis) Sur l'Europe et le droit d'asile, une excellente note de ifri vient d'être publiée : pdfhttps://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/droitasile_tardis.pdf
(3)
Le collectif « Reprenons l’initiative
contre les politiques de racialisation » cherche à mobiliser chercheurs,
militants politiques, syndicalistes, associatifs, citoyens notamment des
quartiers populaires, pour pousser des débats et lever des tabous qui existent
y compris dans des associations antiracistes. Il donne toute sa place à la
solidarité avec les Roms, en faisant une des questions emblématiques du racisme
institutionnalisé (cf le livre d’Eric Fassin : Roms et riverains, une
politique municipale de la race). Les Roms sont visés par un article de la loi
sur « les droits des étrangers », qui permet l’expulsion, l’interdiction
du retour et même l’interdiction de circuler sur le territoire national de ressortissants de l’Union européenne qui « abusent de leur liberté de
circulation ». Cet été, comme les mois précédents, une série de
démantèlements de campements jette à la rue des centaines de familles roms sans
solution autre qu’une errance dans la misère. (voir la pétition pour ceux de La
Courneuve, sur le site de La Voix des RRoms).
(4) le communiqué du PCF après la rencontre de Berlin du 25 août : http://www.humanite.fr/refugies-europe-un-monde-en-commun-appelle-un-devoir-dhumanite-pcf-582356
(4) le communiqué du PCF après la rencontre de Berlin du 25 août : http://www.humanite.fr/refugies-europe-un-monde-en-commun-appelle-un-devoir-dhumanite-pcf-582356
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