Le séisme politique nous a laissés groggy, nous qui avons fait
campagne pour rompre, transformer l’Europe, pour une alternative de gauche à la
politique du gouvernement de la France qui continue celle de la droite, et qui
mène à la catastrophe… Personnellement, il m’a fallu presque une semaine pour
tenter de dépasser un état nauséeux. Le score du FN, c’est le pire des
cauchemars politiques devenu réalité, des
matins sombres, comme si on restait prisonnier du côté obscur du miroir. Alors,
on croise des SOS sur le WEB, on se rassemble par milliers pour dire que le
fascisme et la haine, ça ne passera pas.
On se dit qu’on est nombreux, au PCF, au Front
de gauche, dans d’autres courants socialistes, écologistes, anticapitalistes, à
chercher obstinément une issue, des Lumières nouvelles, pour un printemps des
peuples… Pour ne pas tourner en rond sur des pistes mal balisées, pour éviter
des raccourcis qui ont parfois l’attrait
vertigineux de l’abîme, pour inventer des voies inexplorées, il faut commencer
par quitter, autant que ce peut, le
monde des métaphores, comme celui du langage banal et convenu.
Un travail d’analyse de terrain de ce qui s’est passé à
l’élection européenne du 25 mai est nécessaire. Que chacun le fasse à son
échelle, modestement. Sans se raconter d’histoires : une histoire qui
donne du sens à l’Histoire, ce n’est pas tout seul qu’on va y arriver, comme
ça, sous le coup de l’inspiration née
d’un traumatisme, et je crois que c’est
valable pour les partis comme pour les individus. Chacun a sa réalité vécue,
qui n’est pas exactement celle du voisin. D’où l’importance de partir de son
enracinement. Les Tours Aillaud, à Nanterre, c’est la cité que j’habite, où
j’ai fait campagne pour le Front de gauche, où j’ai été membre du bureau de
vote n° 46. Les résultats dans la cité populaire et dans la ville n’ont pas été les pires
d’Île-de-France, loin de là, mais ils
ont été très décevants, inquiétants, mauvais.
Bureau 46, groupe scolaire Maxime
Gorki maternelle
Inscrits :
970 ; Votants : 247 (25, 46 %) ;
Blancs : 4 ; Nuls : 4 ; Exprimés : 239
PS-PRG : 51 (21,33 %) ; FN : 50 (20,9
%) ; FdG : 33 (13,8 %) ;
UMP :
23 (9,6 %) ; EELV :
22 (6,7 %) ; UDI-MODEM : 12 (5,2 %) ; Europe citoyenne : 8 ; Debout la France : 7 ;
Nouvelle donne : 7 ; Force vie : 7 ; Alliance écolo.
Indépendante : 5 ; NPA : 4 ; Europe libre : 2 ;
UPR : 2 ; Nous citoyens : 1 ; Cannabis : 1 ;
Espéranto : 1 ; Féministes : 1 ; LO : 1 ;
Europirates : 1
Bureau 47, groupe scolaire Maxime
Gorki élémentaire
Inscrits :
1087 ; votants : 260 (23,91 %) ;
blancs : 9 ; nuls : 3 ; exprimés : 248
PS-PRG : 63 (25,6 %) ; FN : 44 (17,8 %) ; FdG : 33 (13,3 %) ;
UMP :
25 (10 %) ; EELV : 23 (9,2 %) ; UDI-MODEM : 15 (6%) ; LO :
9 ; Alliance écolo. Indépendante : 7 ; Nous citoyens :
4 ; Debout la France : 4 ; Force vie : 4 ;
Cannabis : 3 ; UPR : 3 ; Nouvelle donne : 3 ;
Europe citoyenne : 3 ; NPA : 3 ; Parti européen :
1 ; Régions peuples : 1 ;
Féministes : 1
Nanterre
Inscrits :
45 134 ; abstention :
63,56 % (56,87% en Île-de-France, 57,57 % nationalement); Blancs et
nuls : 3,29 % ; Exprimés : 15 905
PS-PRG : 2605, 16,38 % (14,3 % en ÎdF, 13, 98 %
nat.) ; FN : 2578, 16,21 % (16,99 % en
ÎdF, 24,85 % nat.) ; UMP : 2242,
14,10 % (21,72 % en ÎdF, 20,8 % nat.) ; FdG :
2154, 13,54 % (6,55 en ÎdF, 6,33 % nat.) ; EELV : 1699, 10,68 % (9,47 % en ÎdF, 8,95 % nat.) ;
UDI-MODEM :
1646, 10,35 % (11,9 % en ÎdF, 9,93 % nat.) ; Nouvelle donne : 466 (2,93
%) ; Debout la France : 456 (2,87 %) ; Europe citoyenne :
320 (2,01 %) ; Nous citoyens : 303 (1,91 %) ; Alliance écolo.
Indépendante : 267 (1,68 %) ; NPA : 261 (1,68 %) ; LO : 235 (1,48 %) ;
Force vie : 140 (0,88 %) ; Cannabis : 126 (0,79 %) ;
UPR : 110 (0,69 %) ; Europirates : 84 ; Féministes :
56 ; Europe libre : 29 ; Espéranto : 27 ;
décroissance : 21 ; Europe solidaire : 20 ; fédéraliste :
18 ; France royale : 15 ; vote blanc : 12 ; Régions
peuples : 11 ; Parti européen : 2 ; ext. g. Com. : 2
Tous les résultats de Nanterre, bureau par bureau : cliquer
Quand les trois quart des électeurs de ma cité ne viennent
pas voter, les résultats en pourcentage des exprimés paraissent gonflés et
arrogants. Et d’autres bureaux de la ville ont compté moins de 20 % de votants. La
crise de la démocratie et de la politique est d’autant plus criante que parmi
mes voisins rencontrés au porte à porte, devant les écoles, sur les marchés… ils
sont des centaines à ne pas être inscrits sur la liste électorale alors qu’ils
le pourraient. D’autres voudraient devenir électeurs, citoyens à part entière,
mais n’ont pas la nationalité d’un pays membre de l’Union Européenne. La cause principale de
l’abstention est la déception et la colère de l’électorat de gauche qui a voté
Hollande massivement en 2012. Le renoncement à exercer son droit de vote
« parce que ça sert à rien » était déjà devenu un comportement
majoritaire aux élections municipales, le 23 mars dernier.
Dans les bureaux de vote de l’école Gorki, où la majorité des électeurs inscrits sont des immigrés nés sur tous les continents, 94 voix pour le FN, en deuxième place, c’est un vrai camouflet. Le score du FN montre que sa banalisation dans les médias,
l’insécurité sociale et sociétale, l’exaspération extrême, la perte de
confiance dans les politiques…ont conduit des habitants de quartiers populaires
à voter Le Pen. Sans doute des électeurs de droite, puisque l’UMP et l’UDI ont
des scores faibles, et que la candidate UMP aux municipales, une proche de
Copé, avait utilisé des thèmes empruntés au FN dans sa campagne. Mais pas
seulement, probablement.
Le Front de gauche n’arrive que 3 ème dans les tours
Aillaud. Pourtant, sa campagne était la plus visible, assurée par les
communistes, avec les forces qu’ils ont, avec, en plus du matériel de campagne régional, leur journal de
quartier, et le journal de la section qui publiait l’appel du maire, d’autres
élu-e-s, de syndicalistes, de citoyennes et citoyens... 66 voix, nos efforts
n’ont pas eu, c’est peu de le dire, les
résultats espérés. L’amertume a été d’autant plus forte qu’au bureau 46,
seul, le PCF-Front de gauche avait fourni un assesseur, et heureusement j’ai pu compter sur le civisme
de deux électrices pour participer au bureau afin que le vote commence à
l’heure ! L’absence d’élus du quartier dans la campagne du Front de gauche,
comme celle d’autres militants du Front
de gauche que ceux du PCF, a sans doute limité la crédibilité de la campagne
militante de proximité.
Le PS a fait jouer
ses réseaux, et la mobilisation de son électorat le plus proche le met en
première place. A l’échelle de Nanterre, le Front de gauche n’arrive que 4 ème,
alors qu’il s’était imposé comme première force à gauche en 2009, avec 15 % des
exprimés .
La comparaison avec
les européennes de 2009 et avec d’autres
villes est utile pour affiner les analyses locales, et pour avancer des pistes
de réflexion sur ce que nous pouvons et devons faire pour changer notre façon
de faire de la politique.
Ce sera l’objet de prochains billets.
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