Le Président du groupe
des élus socialistes de Nanterre écrit dans son éditorial du journal de la
section de son parti : « Pour choisir son candidat(e) (sic !)
aux
élections présidentielles de 2012, le PS et le PRG proposent à l’ensemble des
citoyens inscrits sur les listes électorales, de participer à ce choix
essentiel ». Un message qui s’adresse à « tous les électeurs inscrits sur les listes électorales » ?
Non, seulement « si vous vous
retrouvez dans les valeurs de gauche, si vous pensez qu’il faut mettre fin à l’ère
Sarkozy », précise-t-il. Pourtant, beaucoup de citoyens, qui, comme
moi, appartiennent à ces catégories, ne participeront pas à ces « primaires »
organisées par le Parti socialiste pour départager les candidats à l’investiture
de ce parti, malgré la pression médiatique. Je tiens à en donner les raisons.
Reconnaissons
que le PS présente un plateau de candidats variés : leurs positionnements semblent
couvrir la quasi-totalité du champ politique : du sécuritaire droitier au « démondialisateur »
qui incarnerait l’audace à gauche, avec un large centre de candidat-e-s, de l’outsider
aux mieux placé-e-s dans le virage, des personnalités diverses, mais qui
toutes font preuve d’un « réalisme » qui leur inspire de subtiles variantes dans l’art d’accommoder le
système capitaliste mondialisé. Comment, toutes et tous, peuvent-ils se retrouver dans le même projet
que les socialistes ont mis des mois à discuter ? Ne serait-ce donc qu’un
programme de compromis, qu’on peut lire de manières contradictoires, ne
serait-ce qu’un plat dans lequel chaque
candidat pioche ce qu’il veut, ne serait-ce qu’un recueil mou de valeurs et de
propositions qui ne tiennent plus guère la route parce que la crise du
capitalisme s’aggrave brutalement ? Serait-ce que ce ne n’est plus vraiment
aux partis politiques, mais aux sondages et aux médias,
de préparer des programmes, et de choisir les candidats qui les portent ?
Voilà de
nombreux problèmes de fond. Alors que la social démocratie est en crise et en
perte de vitesse en Europe, incapable de résister aux marchés financiers ;
alors qu’aux Etats Unis, l’élection d’Obama,
avec des primaires ultra personnalisées qui servent de modèle, déçoit désormais
aussi fort qu’elle avait ouvert des espoirs, le PS continue à faire comme s’il
pouvait représenter en une grande machine électorale toutes les valeurs de la
gauche, la seule politique de gauche possible. Or, depuis 2005, depuis le vote
trahi qui avait donné la victoire au non à la Constitution ultra libérale de l’Europe
et qui était porteur de propositions alternatives, le Front de gauche a été
inventé, avec des socialistes qui ne se reconnaissent plus dans les choix du PS
et ont fondé le PG, avec le PCF, avec la Gauche unitaire. Il s’élargit à d’autres forces de gauche, à des citoyen-n-es
engagé-e-s dans le mouvement social. Il met en débat un projet, « L’humain
d’abord », il a désigné son candidat commun à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon,
et, dans les jours qui viennent, il va désigner ses candidates et ses candidats aux
législatives dans la quasi-totalité des circonscriptions. Quelle suite est
donnée à la proposition de débat public qui permettrait de confronter le projet
socialistes et les propositions des candidats du PS avec le programme partagé
du Front de gauche ?
J’entends bien que le
PS prétend qu’il s’agit de choisir le candidat du second tour, encore que cela ne
soit pas explicitement précisé dans le journal de la section socialiste de Nanterre.
D’où un nouveau problème de fond. Peut-on prétendre changer la politique, et
même changer vraiment de politique, en se fondant à ce point dans la logique
des institutions de la cinquième République, conçue pour que rien ne change,
pour que le peuple reste éloigné des cercles du pouvoir, confisqué par les
classes dominantes ? Pire, en aggravant encore son caractère anti
démocratique : après la réforme du « quinquennat » et l’inversion
du calendrier électoral entre les législatives et les présidentielles, c’est
maintenant le premier tour de la présidentielle qu’on voudrait escamoter !
Les sondages d’opinion
soufflent depuis des mois le nom du meilleur
candidat, du PS, pour battre Sarkozy au
second tour, celui du champion que l’électorat socialiste n’aurait plus qu’à
plébisciter. On sait pourtant le peu de fiabilité de ces sondages, à plus forte
raison dans une période des plus agitées, dans laquelle beaucoup de choses
peuvent se passer d’ici le printemps 2012. Ces mêmes sondages donnaient le
directeur du FMI, DSK, grand favori il y a peu de temps ! Et de telles
primaires, ce serait ça, le dépassement des partis en crise, qui ouvrirait la
voie d’une démocratie moderne, qui serait à la hauteur des indignations, des
révoltes, de la révolution citoyenne nécessaire pour que ça change vraiment ?
Evidemment, comme la majorité des citoyens de ce pays, je
veux « mettre fin à l’ère Sarkozy »
en 2012. Et j’ajoute, l’empêcher de nuire autant que possible d’ici là, en
étant dans les luttes, en m’appuyant sur toutes les brèches ouvertes dans son
régime en crise, par exemple sur la majorité gagnée par toute la gauche au Sénat.
Au deuxième tour de la présidentielle, comme aux législatives, je voterai pour
la candidate ou le candidat de la gauche arrivé en tête au premier tour. En
attendant, je refuse de me soumettre à la dictature des sondages et au piège
des institutions, à une simple alternance. Avec le Front de gauche, je consacre
mes efforts à créer des espaces de rencontres ouverts, des assemblées
citoyennes pour débattre, enrichir, populariser un programme partagé qui, par
exemple, propose de changer de République, d’élire une assemblée constituante
qui en finira avec le régime despotique que nous subissons.
Des affiches socialistes
m’invitent à « choisir le visage du changement ». Pour moi, le visage du changement est composé
de toutes les têtes des citoyennes et des citoyens à qui je veux restituer le
pouvoir démocratique de faire de la politique.
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