Nombre total de pages vues

40 mars 2016, Place de la République, Paris

40 mars 2016, Place de la République, Paris
cliquer sur l'image pour l'animer

Nanterre en colère

Nanterre en colère
cliquer pour lire les propositions sur le droit du travail JLM 2017

En 2017, changeons la politique !

En 2017, changeons la politique !
cliquer sur la syllabe manquante pour en savoir plus

lundi 21 mars 2016

Migrations : dans quel monde voulons-nous vivre ?


Pour la préparation du congrès du PCF( juin 2016)  j’ai rédigé ce document de travail :

Migrations : dans quel monde voulons-nous vivre ?

21 mars 2016 Nanterre

«Les migrants et les réfugiés» sont à la une des médias, au cœur de débats et de polémiques. Les bidonvilles de Calais, où sont bloquées des milliers de personnes, dont plusieurs centaines de mineurs isolés, auxquelles le Royaume Uni refuse le passage, « externalisant » sa frontière sur le territoire français, est un des symptômes de la crise et de l’impasse des politiques nationales et européenne. Plus de 30 000 personnes sont mortes dans la Méditerranée depuis l’an 2000, victimes de l’«Europe forteresse ». Selon l’OMI, l’Europe est le continent du monde le plus mortifère pour les migrants.(1)

Le choc produit par l’arrivée aux frontières de l’Europe de centaines de milliers de personnes, de milliers en France, contraintes à l’exil par les guerres, les massacres, les bombardements, les crimes de dictatures et de bandes terroristes, au Moyen-Orient ou en Afrique, a des effets contradictoires. D’une part, des réponses aux appels à l’urgence humanitaire : un élan de solidarité avec les « réfugiés » mobilise de nombreuses citoyennes et de nombreux citoyens, membres ou pas d’associations, de paroisses, de syndicats, d’organisations politiques, dont des militants et élus communistes.

D’autre part, la question de l’immigration n’en cristallise pas moins des peurs, des crispations « identitaires », qui trouvent un terreau dans la crise systémique que nous vivons, autant que dans l’horreur sidérante des attentats terroristes.
Pour autant, il n’y a pas de fatalité qui ferait que les souffrances, le besoin de sécurité, les désarrois du peuple de France entraîneraient mécaniquement la montée du racisme, de la xénophobie, des logiques guerrières, plutôt que celle des mobilisations pour le vivre et lutter ensemble, pour la solidarité entre les opprimés d’ici et les peuples opprimés du monde, pour la paix, pour construire « des ponts, pas des murs ».

Pour les 20 ans de Saint-Bernard, 18 mars 2016

1.  Des enjeux à mettre au cœur
    de notre projet communiste

Une relecture de l’important document de 2006, « LES MIGRANTS, le monde en mouvement », - 25 pages d’«analyses et propositions » et 21 pages d’ « annexes » -, reste des plus fécondes. C’est le fruit d’un travail collectif réalisé pendant plusieurs mois par le « réseau migrations-citoyenneté », et il est cosigné par 22 contributeurs. Les orientations qu’il propose ont été votées, la même année, au 33ème congrès du PCF. L’ensemble, s’il est naturellement dix ans plus tard à actualiser, demeure une référence essentielle pour notre projet et nos interventions politiques immédiates. Pourtant, trop peu de communistes le connaissent. Il est accessible sur le site du PCF : http://www.pcf.fr/594  (il sera désigné par « MMM »)
Madjiguène Cissé, 18 mars 2016,
 devant le Gymnase Japy
Ces textes ont été écrits dix ans après les occupations par des sans-papiers de plusieurs édifices parisiens, au printemps et à l’été 1996. La violente évacuation de l’église Saint-Bernard, le 23 août, est restée dans les mémoires (2). Ces évènements ont « ouvert une nouvelle période ». A l’image de celui « des Saint-Bernard » et de son large réseau de soutiens, des collectifs se sont constitués, ou se sont renforcés, dans de nombreuses villes. Ils ont fortement contribué à « changer le regard » sur les migrants, y compris au PCF, ce dont témoigne et ce qu’explique « MMM »
Meeting, 18 mars 2016, Bourse du travail, Paris
La nécessité de travailler en « transversale » avec d’autres commissions et groupes de travail est affirmée, notamment sur 
:
-          La lutte contre le racisme et les discriminations : une contribution de 28 pages a été élaborée pour le 37ème congrès par la commission Lutte contre le racisme et pour l’égalité des droits, intitulée : « L’antiracisme, un défi à relever ! celui de l’égalité et de l’unité du peuple ! », publiée sur le site du PCF :   http://congres.pcf.fr/82787 , lançant, ainsi que d’autres contributions, un débat de fond sur ces questions.

Dans la manifestation de clôture de la quinzaine anticoloniale et antiraciste
19 mars 2016, Paris



-          La solidarité internationale : « le développement des migrations implique de les penser en rapport permanent avec ce que nous entendons par mondialisation, par développement durable… ». et des propositions sont faites pour valoriser « l’apport des migrants comme acteurs essentiels du développement, des coopérations »… L’idée centrale reste d’actualité : « devoir impératif de lutter contre les exodes de la misère », non pour l’arrêt des migrations, mais pour « en changer les raisons, et les modes migratoires ». (MMM page 26)
Quelles perspectives, quel horizon, notre projet communiste peut-il ouvrir pour que le « mouvement du monde », en notre vingt-et-unième siècle, ne soit plus source d’angoisse, mais d’espoir ? Les propositions et actions contre les guerres, pour des solutions politiques aux conflits, contre les terrorismes, contre le commerce des armes et pour le la paix, en lien avec la question des réfugiés et demandeurs d’asile, sont pour cela essentielles.

19 mars 2016, Paris

Dans la manifestation contre l'état d'urgence
et les lois liberticides. 
Paris, 12 mars 2016.
Synthèse et propositions

I.            L’urgence de la solidarité avec les demandeurs d’asile

L’augmentation du nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés dans le monde, en Europe, et dans une moindre proportion en France, crée une situation d’urgence humanitaire. Le droit d’asile, qui est un devoir et une obligation définie, depuis la Convention de Genève, par le droit international qui s’impose aux Etats signataires, est de plus en plus bafoué.
 Certes, l’accueil des réfugiés est un coût, mais ce sont des pays pauvres qui en assument la plus grande part. L’Union Européenne, les Etats qui en sont membres, sont loin d’assurer une part proportionnelle aux richesses qui y sont produites, ni à leur responsabilité dans un état du monde qui génère des « déplacements de population plus importants que jamais », en « hausse majeure » depuis 2011 (UNHCR).
 Le droit d’asile répond, en ultime recours, à la situation d’urgence de personnes contraintes à l’exil pour des raisons vitales. Les guerres et les terrorismes en sont les causes principales. Les luttes et l’ouverture de perspectives politiques pour la paix dans le monde sont évidemment essentielles pour faire cesser ces causes. Mais le monde est en état d’urgence humanitaire, et rien n’indique, au contraire, que cela va changer dans l’immédiat.

I.1.  Donner priorité au droit à la vie :

- développer vraiment les moyens pour que le droit international sur le sauvetage en mer soit appliqué en Méditerranée, supprimer le « visa Balladur » à Mayotte,
- ouvrir des routes d’accès légales et sécurisées, seul moyen d’empêcher la mort de dizaine de milliers de migrants, les violences que subissent notamment les femmes, d’en finir avec les odieux trafics des passeurs et des mafias.

I.2. Appliquer la Convention de Genève :

Il faut permettre de déposer sa demande d’asile sur le sol de l’Union européenne, dans le pays de son choix (en raison par exemple d’attaches familiales, de connaissance de la langue…), ce qui implique :
 -  de dénoncer les accords de Dublin et du Touquet, et de garantir la liberté de circulation dans l’espace Schengen,
- d’en finir avec les dépenses consacrées à l’édification de frontières fortifiées et militarisées, à des centres de tri type « hotspots » ; cet argent pourrait contribuer au financement d’un fond commun,  dans le cadre de l’Union Européenne, permettant une aide équitable aux Etats, en fonction de leurs PIB et du nombre de réfugiés qu’ils accueillent ; des sanctions, y compris financières, pourraient être envisagées à l’encontre des Etats qui refusent, pour des raisons idéologiques, alors qu’ils en auraient les moyens, de contribuer à l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés,
- d’interdire les réadmissions contraintes de migrants, dont les déboutés du droit d’asile, dans des pays tiers, et annuler toutes les clauses de réadmission dans les accords d’aide pour la coopération et le développement. 

I.3. Assurer en France un accueil humain et digne :

- Des moyens doivent être donnés aux préfectures et aux services de l’Etat pour l’accueil, l’hébergement, l’accès aux droits administratifs et sociaux, à la santé, des demandeurs d’asile, qui doivent avoir accès plus rapidement à l’emploi, et pour le logement des réfugiés. Les partenariats avec des associations et les collectivités locales ne doivent pas faire reposer sur ces dernières, ni sur la charité publique ou les profits privés, l’essentiel de la solidarité.
- L’OFPRA et la CDA doivent statuer, en toute indépendance, sans pression politique des gouvernements ni des partis. Elles doivent avoir les moyens de traiter dans les meilleurs délais, en collectifs de magistrats, toutes les demandes des personnes, dans des conditions leur permettant d’être entendues, assistées et défendues. Les listes de « pays sûrs » doivent être supprimées, les atteintes à la vie ou aux droits fondamentaux des personnes n’étant pas le fait exclusif de certains Etats, et ne correspondant pas aux limites des frontières dans plusieurs régions et sur plusieurs continents.
-  Les dispositions légales et les circulaires favorisant l’expulsion rapide et systématique du territoire des déboutés du droit d’asile doivent être abolies.

II.   Une nouvelle politique pour tous les migrants

  La distinction entre les demandeurs d’asile et les autres migrants est souvent difficile, voire arbitraire. On distingue les réfugiés (politiques, humanitaires, victimes de guerre, de dictatures, de discriminations et de violences, des terrorismes…), parce qu’ils sont protégés par le droit international, ou ont droit à des statuts, plus précaires, de « protection subsidiaire ».  Ne faudrait-il pas multiplier les catégories : « réfugiés économiques », « réfugiés environnementaux, climatiques »… ?
  Les luttes et l’ouverture de perspective politique pour de nouvelles relations internationales, pour des coopérations et la solidarité entre les peuples du monde, pour en finir avec la domination mortifère du système capitaliste à l’échelle de la planète, sont essentielles pour supprimer les causes des « exodes de la misère », des exils qui sont toujours des déchirures et des souffrances. Et contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas d’« un appel d’air » qui attirerait vers l’Europe les plus pauvres de la planète : une très petite minorité des 7 milliards de ses habitants a les moyens d’émigrer, et la plupart restent dans des pays voisins. Ramener les choses à leur juste proportion est nécessaire : l’immigration en France est ancienne, et les flux actuels (entrées et sorties du territoire) n’évoluent pas plus que la moyenne de l’OCDE. Ils indiquent en outre que la France tend à devenir plutôt un pays de transit.
  Les phénomènes migratoires sont mondiaux et ils sont irrépressibles, comme le montre l’échec des politiques visant jusqu’à présent à fermer les frontières aux migrants, à les trier par quotas, à opposer, - explicitement ou implicitement -, « immigration choisie » à « immigration subie ». Les migrants doivent au contraire être considérés comme des acteurs essentiels pour un réel « co-développement ».       Les aides, souvent vitales, qu’ils transfèrent dans leurs pays d’origine, sont bien supérieures au montant total de toutes les aides au développement. Et contrairement à ce qui se dit sur le coût de l’immigration, les dépenses pour les accueillir sont bien inférieures à ce qu’ils « rapportent » sur le plan économique aussi, aux pays où ils sont installés.
  Le chômage massif, qui touche les travailleurs immigrés comme les autres travailleurs, ne peut être un argument recevable pour arrêter l’immigration. Dans le passé, de telles mesures n’ont jamais empêché la progression du chômage. Les luttes et les propositions politiques pour partager le travail et augmenter sa rémunération, pour un développement économique, social, écologique, créateur d’emplois, sont essentielles aussi pour traiter de bonne manière la question de l’immigration.  
   Les migrations et les métissages ont depuis toujours été des phénomènes constitutifs des civilisations humaines et de leurs progrès. C’est encore plus vrai aujourd’hui avec l’essor mondial des transports, des communications, de tous les échanges.  Que les libertés de circulation et d’installation ne soient plus le privilège des riches et de citoyens des pays dominants : c’est un nouveau droit humain à conquérir.
  Les idéologies et les politiques racistes et xénophobes, qui inventent des « identités nationales ethniques », lesquelles seraient à préserver par des fermetures de frontières, sont à combattre sans concession.  
 
II.1.  Changer pour de bon les conditions d’entrée et de séjour des migrants :

-          Supprimer les visas de court séjour, pour favoriser la « migration circulaire ».
 
-          Accorder de droit à tous les immigrés étrangers un titre de séjour unique, sur le modèle de la carte de résident valable 10 ans et renouvelable. C’est le seul titre de séjour qui permet de sortir de la précarité.

-          Supprimer les taxes, d’un montant devenu exorbitant, exigé des migrants pour obtenir un titre de séjour.

-          Fermer les centres de rétentions administratifs, supprimer les dispositions dérogatoires au droit commun, et attentatoires aux droits de la personne humaine, notamment en Outremer, et dans les zones d’attente des aéroports.

-          Obtenir la ratification par la France, et les autres pays de l’Union Européenne, de la Convention internationale pour les droits des travailleurs migrants et leurs familles
.
-          Empêcher l’utilisation des « travailleurs détachés » à des fins de dumping social, en leur garantissant mêmes salaires et mêmes droits que ceux des salariés autochtones.

-          Elargir à un collectif interministériel la responsabilité des questions de l’entrée et du séjour des migrants, qui ne doit plus relever du seul ministre de l’Intérieur.

-          Considérer, pour une réécriture de la loi, que le droit des migrants d’entrer et de séjourner en France doit être la règle, et non plus l’exception.

-          Augmenter l’aide au développement, pour atteindre les 0,7 % du PIB auxquels la France s’est engagés, et revoir ses attributions à partir des besoins des populations, en concertation avec des associations, l’ONU, et les migrants, en excluant toute accaparation à d’autres fins par des Etats et des intérêts privés.


II.2.  Protéger d’urgence les catégories les plus vulnérables :

-          Faire campagne pour l’adoption de la proposition de loi pour la protection des femmes migrantes, déposée à l’Assemblée nationale en juillet 2015 à l’initiative de Marie-George Buffet, en s’appuyant sur une résolution sur le même sujet adoptée par le Parlement européen en mars 2016.

-          Faire respecter la Convention Internationale des Droits de l’Enfant : les Mineurs Isolés Etrangers (MIE) doivent être pris en charge dans les mêmes conditions que les mineurs nationaux. L’utilisation des « tests osseux », non fiables pour déterminer leur âge, doit être interdite. A leur majorité, tous doivent recevoir un titre de séjour, et leur prise en charge doit pouvoir être assurée jusqu’à la fin de leurs études ou jusqu’à ce qu’ils accèdent à l’emploi.
L’expulsion de jeunes scolarisés, de leurs parents, doit être rigoureusement interdite, et la régularisation de leur séjour être de droit.
-        Le droit aux soins doit être garanti pour les personnes malades qui ne peuvent pas se faire soigner dans leur pays d’origine ou qui ont commencé leur traitement en France. Les décisions doivent dépendre de médecins habilités, mais, contrairement aux dispositions de la loi de février 2016, indépendants de l’OFII. La prise en charge de personnes titulaires de l’AME ou de la CMU doit être une obligation effective, respectée par tous les praticiens.
-        Les quelques milliers de migrants, citoyens européens pauvres, qu’on appelle Roms, ne doivent plus être traités en boucs émissaires, chassés de bidonvilles en campements. Des mesures d’urgence pour leur logement, pour leur accès aux droits, pour la scolarisation de leurs enfants, doivent être prises. Elles pourraient s’inspirer des propositions faites par six maires de la région parisienne et le Conseil départemental du Val de Marne, en janvier 2016, pour la résorption des bidonvilles.

III.        Vers une citoyenneté de résidence

L’égalité des droits entre immigrés et autochtones, au travail et dans la cité, est une question toujours d’actualité. Elle est presque aussi ancienne que l’immigration en France.
Dans l’entreprise, dans la vie syndicale, et dans la vie associative de la cité, des acquis importants ont été obtenus. Mais  l’ouverture des concours des trois fonctions publiques, d’Etat, territoriale et hospitalière, n’est pas acquise, pas plus que l’accès à certaines corporations. Pourtant, l’emploi massif de personnels non-titulaires de nationalité étrangère dans la fonction publique, y compris dans l’Education nationale, ou le recours à des médecins étrangers dans les hôpitaux, montrent que cette injustice devrait cesser. 
 
Les droits politiques restent en suspens. L’extension du droit de vote aux résidents étrangers, proposition du PCF réaffirmée au congrès de 2006, et depuis, continue de faire débat. Touchant le principe constitutionnel de souveraineté des seuls nationaux, il nécessite un changement de la Constitution, surtout si on le revendique pour toutes les élections. Certains, à gauche, préfèrent revendiquer une plus facile acquisition de la nationalité. Effectivement, l’application intégrale du droit du sol reste à conquérir, et l’acquisition de la nationalité ne devrait plus être soumise à un processus aussi long, compliqué et intrusif qu’incertain d’aboutir. Mais pour des raisons personnelles ou historiques, des immigrés, souvent présents depuis longtemps en France, restent attachés à leur nationalité d’origine.

 Toujours est-il que des campagnes, un engagement électoral du Président de la République, avaient soulevé de l’espoir, au moins pour le droit de vote aux élections locales, ou municipales, tel que la France a dû l’accorder, à minima, pour les résidents citoyens des autres Etats de l’Union Européenne. Dans les campagnes électorales de 2017, et avant, la revendication du droit de vote pour les étrangers résidents doit avoir toute sa place. 




Aucun commentaire: