Un dossier de presse qui ouvre des perspectives ! |
manifestation, en 2012 |
La
conférence de presse organisée à la mairie de Nanterre mardi 6
octobre, pour faire le point des blocages et présenter un ambitieux
projet urbain et architectural pour moderniser le Centre d'Accueil et de
Soins Hospitaliers (CASH) Max Fourestier, devrait relancer le débat
et marquer une nouvelle étape de la lutte, avec l'annonce d'un
référendum local.
Le
Comité de défense et de modernisation, rassemblant élu-e-s de la
majorité municipale, usagers, médecins de la commission médicale
et de la commission sociale, syndicats des personnels, s'était
constitué en 2011 contre la volonté de l'ARS de rayer l'hôpital de
Nanterre de la carte, avec notamment l'annonce de la fermeture de
services d' urgences et de réanimation. Depuis 4 ans, de pétitions
en rassemblements, de manifestations en délégations à l'Agence
Régionale de Santé (ARS) et au Ministère, la mobilisation n'a
guère faibli pour sauver l'établissement.
L'Hôpital
est toujours en danger
La
lutte n'a pas été vaine : le Conseil d'Administration de
l'hôpital Max Fourestier a adopté, en 2013, un projet «
bi-sites », certes imparfait, mais assez équilibré, avec
l'hôpital Louis Mourier de Colombes. Mais, explique Jacqueline
Fraysse, depuis, ni ARS, ni Assistance Publique-Hôpitaux de Paris
(AP-HP) dont dépend Louis Mourier, « ne jouent
le jeu ni ne coopèrent ». Malgré un « accord
cadre de partenariat conclu en décembre 2014 entre le Préfet
de Police de Paris (autorité administrative dont dépend le
CASH) et l'AP-HP », « le
développement de la chirurgie ambulatoire à l'hôpital Max
Fourestier (...), une des contreparties
essentielles aux nombreux transferts d'activité médicales (dont
en juin la pneumologie) vers l'hôpital Louis
Mourier », où vient d'être annoncé par voie de
presse spécialisée « le développement d'une...plate
forme ambulatoire » (!) , ne se fait pas. La députée
s'en indigne dans un échange de courriers daté du mois d'août avec
Martin Hirsch, directeur de l'AP-HP.
Alors
que le CASH voit ainsi partir sans contreparties des services aussi
utiles pour la population que rémunérateurs pour l'établissement,
le COPERMO (autorité gouvernementale), durcit ses exigences
financières. Le déficit budgétaire a diminué de plus de
moitié depuis 2012, passant de 14,6 millions à 7 millions d'euros.
Mais il faudrait encore, dès maintenant, réduire les dépenses
d'investissement de 7 millions, et le déficit de 3 millions, selon
les exigences des technocrates chargés d'appliquer la politique
d'austérité en rognant dans les dépenses publiques de santé.
C'est « l'asphyxie programmée de
l'établissement », s'indigne
Jacqueline Fraysse. Ce sont encore des centaines de postes
de personnels qui risquent de disparaître, après les 130
« équivalents temps pleins » sacrifiés en 2014 !
Les conditions de travail
empirent, l'incertitude du lendemain demeure et la souffrance
grandit, pour les personnels soignants et pour les travailleurs
sociaux dont beaucoup ont des contrats de travail précaires. La
« démoralisation » touche presque tout le monde. Daniel,
représentant des usagers, s'en fait l'écho : « Je
suis suivi – et très bien soigné – en cardiologie et en
diabétologie. Un responsable du service diabétologie m'a dit que si
la cardiologie partait, lui aussi fermerait son service ».
à gauche, des médecins du CASH |
Le docteur Luc Rosenbaum, président
de la commission médicale d'établissement, donne des raisons
d'espérer et de se mobiliser, fondées sur un projet partagé et
réaliste fait par l'équipe du CASH. L'hôpital de Nanterre peut et
doit se moderniser, pour répondre aux besoins la population du
secteur, où le manque d'offre médicale libérale est préoccupante,
surtout pour les habitants les plus pauvres. Le projet de
modernisation s'inscrit aussi dans un plan d'intérêt régional, ce
serait à l'ARS de le défendre, regrette-t-il, avant de remercier
les élus de Nanterre de le porter. Si on laisse faire, ajoute-t-il,
il n'y aura plus que des hôpitaux privés, alors que seul l'hôpital
public accueille et soigne les plus démunis, sans conditions de
ressources, en coopération notamment avec les centres de santé
municipaux.
Sans
l'hôpital, pas de secteur médico-social
Jacquelin Fraysse, députée, Patrick Jarry, maire, Habiba Bigdade, adjointe au maire déléguée à la santé |
Le
maire, Patrick Jarry, l'a
souligné dans son introduction, et le docteur Jacques Hassin,
président de la commission sociale d'établissement, à son tour le
développe et y insiste : le CASH de Nanterre, c'est aussi 247
places d'accueil de sans abris, 230 places en Centre d'Hébergement
Social de Réinsertion (CHSR), 248 places pour retraités sans
ressources (EPAHD), une école d'infirmières
« externalisée »...Historiquement,
c'est la prison pour les pauvres de Paris, ouverte au XIX ème
siècle, qui s'est dotée d'un centre de soins hospitaliers, devenu
un hôpital qui s'est développé au XXéme siècle, s'est ouvert au
quartier, à la ville, au bassin de population, avec la montée des
besoins, et les progrès des politiques de santé publiques dont les
moteurs ont été les luttes sociales dont nous sommes les héritiers.
D'où son statut atypique, sa dépendance administrative du Préfet
de Police de Paris, et son enclavement dans les vestiges d'un mur
d'enceinte.
C'est
là aussi qu'ont été amenés cet été, bon gré- mal gré, par la
police , quelque 80 demandeurs d'asile Erytréens et Soudanais,
chassés de Paris, en deux « vagues » principales, en
juin et en septembre. Comme
l'avaient été, il y a quelques années, des immigrés maliens.
« Les accueillir, c'est notre rôle, c'est notre fierté »,
affirme Jacques Hassin, qui fait remarquer que « si
l'Etat subventionne l'hébergement et la nourriture, rien n'est prévu
pour les consultations et les soins médicaux dont beaucoup ont
besoin, parfois des interventions importantes, que nous assurons
parce que nous sommes un hôpital. Et après, on vient nous parler de
déficit du budget ! ». Un
exemple qui illustre les raisons de l'engagement de la commission
sociale du CASH avec les autres composantes du comité de soutien et
de modernisation : sans hôpital, plus de secteur médico-
social, plus d'accueil utile des demandeurs d'hospitalité, qu'ils
soient Français ou étrangers. Ce serait une régression vers
une prison-asile pour les pauvres, avec tout au plus une infirmerie,
comme au XIX ème siècle !
La
« synergie sanitaire et sociale », c'est
précisément ce qu'il faut préserver, développer, et c'est celà
qui est déjà menacé, avec les « réducions de
voilure » imposées
par les restrictions budgétaires, avec les externalisations, sans
réelle garantie d'ouvrir de tels lieux ailleurs, par exemple pour
les places en CHRS. Au contraire, la moderniser, l'adapter aux
conséquences de la crise que nous vivons, ce ne devrait pas être
seulement l'affaire de la ville, du bassin de vie, mais devenir un
projet à vocation régionale, avec un soutien national. Le projet de
collaboration avec l'Université de Nanterre, pour créer un
« Institut sur la précarité et l'exclusion
sociale », en
constitue une des pistes.
Casser
les murs de la « prison pour les pauvres »
Le projet ambitieux
présenté par Patrick Jarry au nom de la Municipalité est donc
cohérent, novateur et moderne pace qu'il articule un hôpital de
proximité inscrit dans la coopération avec Louis Mourier et
l'AP-HP, une vocation sociale d'hébergement, d'accueil et de soin à
« redimentionner et humaniser », et, principale
révélation publique de la conférence de presse, un projet
urbain et achitectural. La volonté est d'ouvrir l'ensemble sur la
ville, de l'intégrer au quartier. Six phases sont annoncées,
pour un projet qui, progressivement, d'ici 2030, aurait au final
changé profondément le site de 17 hectares resté presque en l'état
depuis plus d'un siècle. Seuls seraient laissés dans leur
configuration actuelle deux bâtiments en raison de leur intérêt
architectural.
images extraites du dossier de presse |
Le CASH serait traversé par deux voies de
circulation, les espaces verts dits « Jardin Japonnais »
et « du cloître » seraient désenclavés. Environ la
moitié des places en CHRS et en EPAHD seraient « externalisés »
vers d'autres villes du département, pour se conformer à des
normes habituelles pour ce type de structures. Le secteur
psychiatrique pourrait accueillir quatre des six unités pour
lesquelles l'ARS cherche une localisation nouvelle dans le
département, à condition que les bâtiments soient reconstruits
dans des délais raisonnables pour améliorer les conditions
d'accueil des patients et des familles. L'école d'infirmières
seraient réintégrée sur le site, et un pôle universitaire de
formation et de recherche sur les métiers médico-sociaux pourrait
être créé par la Région.
tableau extrait du dossier de presse |
Resteraient une
vingtaine de milliers de mètres carrés disponibles. Le maire tient
à réaffirmer que « Nanterre n'a pas besoin de ces
terrains pour construire des nouveaux logements, puisque 800 par an
sont construits, et des milliers sont prévus dans la zone des
Groues ». Cependant, le projet prévoit d'en construire
« quelques uns » le long des nouvelles rues
qui traverseront le CASH, en accession à la propriété, voire
quelques locatifs pour les salariés du site, pour une « véritable
intégration à la ville », et aussi parce que cela
pourrait contribuer au financement du projet à hauteur de 10 à 15
millions d'euros. Mais le terrain appartient à la ville de Paris, et
la convention actuelle d'occupation par le CASH interdit toute
construction autre qu'hospitalière ou médico-sociale. Des prémisses
de négociations seraient déjà en cours avec la Municipalité de
Paris.
Le coût total de
l'opération est pour l'instant estimé à 93,7 millions d'euros,
à répartir pour l'essentiel entre l'ARS, le Département, la
Région, l'Etat. Une somme à comparer par exemple aux 20 millions
que coûte la contruction d'un groupe scolaire, ou aux 63 millions
dépensés par la Région pour la reconstruction/réhabilitation du
lycée Joliot Curie. Mais pour que « CASH 2030 » ne soit
pas une utopie, il n'en reste pas moins qu'il implique de sortir des
visions à courte vue des partisans de l'austérité et des coupes
budgétaires.
Vers
un référendum local à Nanterre
intervention de Marc Guérin |
La bataille est donc loin
d'être gagnée. Marc Guérin, animateur du Comité de défense et de
modernisation du CASH de Nanterre, a annoncé l'organisation, en
novembre, d'un référendum. Pour le préparer, toutes les bonnes
volontés sont invitées à participer à une réunion :
Jeudi
8 octobre à 18h30 salle 14, au niveau -1 de la mairie.
Ecouter
la conférence de presse :
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