Plus d’une semaine que la France est en guerre. Comme vous, je l’ai appris par une déclaration du Président de la République. Avant que les parlementaires en soient officiellement informé-e-s. Certes, nous dit-on, il y avait urgence : qui aurait laissé sans rien faire les bandes lourdement armées d’assassins, qui osent se réclamer de l’Islam, religion de paix qui est celle de 90 % des Maliens, se ruer sur Bamako ? quand le gouvernement provisoire du Mali appelle la France au secours ? A la tête de ces « djihadistes », spécialistes des enlèvements, des mutilations et des exécutions sommaires, du recyclage de l’argent de la drogue, des destructions de mausolées appartenant au patrimoine mondial de l’Humanité : les mêmes égorgeurs qui ont massacré des démocrates, des femmes, des milliers d’innocents pendant les années noires en Algérie.
Mais la France est entrée seule en guerre, aux côté d’une armée malienne qui peine à se reconstruire…Le massacre qu’a provoqué la prise de centaines d’otages sur un site gazier en Algérie montre que le risque de déstabilisation par le terrorisme de toute la région est désormais bien réelle, et notre pays n’est pas à l’abri d’attentats. Les Etats Unis d’Amérique, les pays de l’Union européenne, d’autres puissances, encouragent l’intervention française, mais leur aide concrète est des plus timides. Les troupes des pays africains unis pour intervenir dans le nord du Mali en septembre 2013 ne sont pas encore opérationnelles. Le mandat de l’ONU permettant à la France d’envoyer son armée est imprécis, et les buts de guerre de la France sont flous et changeants, la durée prévisible de cette guerre s’allonge de jour en jour. Alors, la France gendarme de l’Afrique dans son ancien empire colonial, dans la tradition de la Françafrique ? Comment s’étonner que le doute s’installe : des intérêts capitalistes, la mainmise sur les richesses du sous-sol du Sahel sont en jeu.
Comment en est-on arrivé là ? Les stratèges de la guerre en Lybie, Sarkozy et l’OTAN, ont laissé les bandes « djihadistes » s’emparer des armes dans les arsenaux de la dictature défaite. Ces « djihadistes » ont le soutien des riches pays du Golfe, amis des Etats-Unis et de la France. Le Sahel est une région instable depuis le découpage du territoire des Touareg par la puissance coloniale française. Le Mali, un des pays les plus pauvres du monde, victime du pillage néocolonial, des traités commerciaux et financiers qui ruinent les productions vivrières, connaît une crise politique et économique si grave que son Etat est démantelé, son armée affaiblie. En avril 2012, Aminata Traoré , avec d’autres personnalités maliennes, lançait un nouveau message d’alerte au monde.
En France, des sondages font état d’un soutien à 75 % de l’opinion publique pour l’entrée en guerre de la France. Mais nos compatriotes ne seraient qu’à peine plus d’un tiers à « faire confiance » au Président de la République et au chef du gouvernement pour résoudre ce conflit. Les partis politiques font-ils l’ « union sacrée » autour du chef de l’Etat ? En ce qui concerne les députés du front de gauche, l’intervention de François Assensi à l’Assemblée nationale est critique :
Le Parti communiste français, dans un communiqué publié samedi (dont les « grands médias » à ma connaissance n’ont pas fait mention) demande « une concertation de l'ensemble des pays européens et de l'Union européenne avec les pays du Sahel, les pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée, l'ensemble des États de l'Union africaine pour entreprendre une transformation radicale des règles et des conditions de la coopération, des financements et des critères de l'aide au développement, pour construire une véritable sécurité et une paix durable pour les peuples de cette région. Le déroulement tragique et très préoccupant de cette crise doit contraindre l'ensemble des gouvernements concernés à l'urgence d'une réflexion collective sérieuse sur les causes afin que des réponses alternatives et fortes soient engagées pour l'avenir. »
Nos amis Maliens, immigrés en France, avec ou sans papiers, voient dans l’intervention militaire de la France un possible salut pour leurs familles, pour leurs proches au pays. Ce pays dont il font survivre des villages entiers avec les mandats qu’ils envoient, prélevant sur leurs maigres salaires…et dont le cumul représente plus du double de l’aide au développement du Mali de la part de l’Etat Français ! Ce qui n’empêche pas des préfectures de vouloir expulser des Maliens, travailleurs sans papiers, vers leur pays en guerre…
Non, il n’y a pas de solution militaire aux problèmes du monde, ni au Mali, ni ailleurs.

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