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40 mars 2016, Place de la République, Paris

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Nanterre en colère

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mardi 20 septembre 2016

Avec les demandeurs d’asile du 92, devant la FACEM, à Nanterre.



Lundi 19 septembre, 7 heures du matin. La petite foule des demandeurs d’asile s’agite sur le trottoir étroit de la rue Ernest Renan, une voie discrète, bordée de pavillons et d’entreprises, du quartier du Chemin de l’Île, à Nanterre. C’est là que la FACEM, entreprise privée chargée du pré-accueil des demandeurs d’asile par la Préfecture des Hauts-de-Seine, a déplacé ses bureaux, qui ouvrent à 9 heures, trois jours par semaine. Mais c’est le lundi matin qu’il faut être là, à attendre des heures avant le jour, parce que la Préfecture ne traite que 75 ou 80 dossiers par semaine : donc seuls les premiers auront la chance de pouvoir dans les jours suivants atteindre le guichet du service des étrangers de la préfecture, chargé de trier et de transmettre les dossiers à l’OFPRA. Les autres devront revenir la semaine suivante. Avoir les bons numéros, c’est aussi pouvoir accéder aux droits les plus élémentaires, à un revenu de survie, à l’accès aux soins, à un hébergement… Pas étonnant dans ces conditions que quelques jeunes poussent pour resquiller des places, que des querelles éclatent. Cette fois, une patrouille de police intervient, puis repart après un contrôle rapide de deux ou trois personnes, qui retournent attendre à leur place avec un peu moins de nervosité.  Mais c’est la dignité de la très grande majorité qui impressionne. Quand vers 8h30, un salarié de la FACEM arborera un brassard « sécurité », le calme sera déjà revenu depuis longtemps dans la file qui s’allonge encore de quelques « retardataires ».


Pour ces hommes, majoritairement jeunes, ces quelques femmes, venus de pays ravagés par les guerres, les dictatures, les terrorismes et la misère, la souffrance ne s’arrête pas en passant enfin les frontières de l’Europe forteresse après avoir côtoyé la mort, échappé aux violences de toutes sortes : la maltraitance continue sur le sol de France. On le voit et le dénonce à Calais, Vintimille ou Paris, on ne sait pas assez comment ça se passe pour déposer une demande d’asile auprès des préfectures de banlieues. Et à Nanterre, ce n’est pas le pire, dit-on.
  « Ce matin, pour l’instant, ils ne sont que 93, et seulement une quarantaine à avoir passé la nuit ici, depuis la soirée de dimanche », estime Jean-Yves, qui, avec le Secours catholique, organise chaque semaine un contact humain, distribuant boissons chaudes et viennoiseries. Certaines semaines, ils sont deux fois plus nombreux. Pas de sanitaires ni d’abri, alors évidemment des riverains se plaignent. L’affichette collée sur la vitre du bureau a l’air d’une mauvaise plaisanterie.


La situation est encore pire que devant le 177 avenue Georges Clémenceau, d’où la FACEM a dû déménager suite aux plaintes de patrons d’entreprises établies dans les beaux immeubles bordant la nationale 13. Ici, la misère, à laquelle sont contraintes des personnes qui sont souvent étudiantes, ingénieurs, professeurs, avocat ou médecins, plus souvent que cultivateurs ou pêcheurs, est moins visible.
Avoir enfin le numéro permettant d’atteindre le guichet de la Préfecture ne signifie pas la fin du calvaire. Ceux qui ont eu le malheur de se faire prendre les empreintes digitales en Italie ou dans un autre pays de l’espace Schengen, risquent d’y être reconduits, ou au mieux ils devront attendre plus de six mois pour déposer leur demande d’asile. C’est le cas notamment de nombreux Soudanais que la police a amené de leur campement parisien au Centre d’Accueil et de Soins Hospitaliers de Nanterre. Il faudra de toute façon attendre ensuite plusieurs mois, sinon parfois des années, la décision de l’OFPRA, puis, si elle est négative, le verdict des magistrats de la CDA. La nouvelle loi qui se présente comme voulant accélérer les procédures, risque d’entraîner davantage d’arbitraire. Ainsi, il aura fallu à peine un an pour qu’une jeune femme congolaise, dont l’enfant est scolarisé à Nanterre, soit déboutée de sa demande, et mise en demeure de quitter le CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile). Le 115 est débordé, de telles demandes d’hébergement d’urgence sont rarement vite et bien satisfaites. La majorité des demandeurs d’asile deviennent des sans-papiers.  Des circulaires enjoignent les préfectures à prendre le plus vite possible des décrets d’Obligation à Quitter le Territoire Français à leur encontre. Pour aller où ?
Associations, organisations syndicales ou politiques, collectifs citoyens qui luttent pour les droits de la personne humaine, ont beaucoup à gagner en forces militantes, et en influence, pour changer l’inhumaine politique menée par les « gouvernants » de la France contre les arrivants – demandeurs d’asile, migrants, réfugiés : qu’importe comment on les désigne, ils et elles sont des femmes, des hommes, des enfants.


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