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40 mars 2016, Place de la République, Paris

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Nanterre en colère

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dimanche 15 mai 2016

Les poètes répondent : Résistance !

La maison d’édition Bruno Doucey permet à tous d’entrer en poésie, avec une floraison de textes d’hier et d’aujourd’hui, écrits en vers ou en prose, dans leurs langues d'origine, et une traduction en français.
Les poètes ont donné vie à deux très belles soirées, au centre social et culturel P’Arc-en-Ciel, conjuguant la résistance au présent, et une troisième est en préparation, en partenariat avec le MRAP, pour mercredi 18 mai…

11 mai : résistance et poésie sans frontières


« Résister par l’art et la littérature » : les panneaux de l’exposition réalisée par le Musée de la Résistance Nationale de Champigny embrassent les poètes et leur auditoire.


 L’éclatant sourire de Maram al-Masri contraste avec l’ombre qui mouille son regard. C’est peu dire, que sa poésie est vivante. La belle langue arabe de Syrie émeut aux larmes, avant même que la traduction, faite par l’auteure et lue par son amie l’écrivaine et éditrice Murielle Szac, ne mette en mots pour tous, en apparence si simples, la résistance de l’« exilée d’un pays-blessure qui saigne en elle » :  





« L’avez-vous vu ?
Il portait son enfant dans ses bras
et il avançait d’un pas magistral
la tête haute, le dos droit
Comme l’enfant aurait été heureux et fier
d’être ainsi porté dans les bras de son père
Si seulement il avait été
vivant »

C’est le poème qu’elle a choisi de donner à voir en lettres blanches, en page quatre de la couverture de Elle va nue, la liberté, titre écarlate de son noir recueil, publié en 2013.

C’est encore un enfant, le sien cette fois, le sujet de Le rapt, encore plus récent. Cet enfant qui lui a été enlevé, arraché, quand il n’avait que dix-huit mois, par son mari, pour la punir, elle l’a retrouvé à Paris, jeune homme de vingt-quatre ans. C’est pour retisser le lien d’amour filial, qu’elle s’est résolue à publier l’intimité des mots qu’elle écrivait pour lui, toutes ces années…

« J’avais un enfant
je l’ai caché dans mon ventre
Il a partagé mon corps
je l’ai nourri de mon sang
je lui ai fait partager mes rêves
J’ai chanté pour lui, il souriait
Je l’ai porté, il cessait de pleurer
Ils l’ont arraché à mes bras
J’ai cessé de chanter. »

Le titre est bleu sur fond couleur d’orange :  écoutez Maram.

Maram al-Masri. est sœur de tous les siens, restés dans son pays ravagé par un tyran assassin de son peuple, tant et plus encore que par les tueurs fanatiques de Daech. Elle est sœur des femmes, des enfants, des hommes, qui souffrent et meurent sous les bombes et les tortures, sœur des exilés, des réfugiés. Mais sa voix n’est pas que déchirure, elle est aussi engagement et espérance. Ecoutez « Je veux préparer un monde… ».

Maram al-Masri est franco-syrienne : qu’elle vive, « binationale », ici, nous ferait presque oublier le vent mauvais qui souffle dans notre pays… jusqu’à ce qu’elle raconte comment quatre policiers l’ont « serrée », sans raison, comme ça, dans un train, pour un contrôle : sans doute parce que la belle Maram est arabe, alors, qui sait, peut-être musulmane, aussi présumée suspecte donc que les jeunes du quartier…

13 mai : poésie et résistance sans frontières

Roja Chamankar, elle, vit en Iran.



Pour la deuxième soirée, le cadre a changé : les panneaux de l’exposition des Amis du musée de la Résistance de Chateaubriant, « Résister par l’art et la culture 1940-1945 », sont nos complices.

 Roja Chamankar est en apparence menue et discrète. Il faudra du temps pour que son sourire fleurisse. Ses études entre Strasbourg et Téhéran, son talent de cinéaste, et surtout de poète, ont fait tomber des murs : elle a une carte permanente de résidente, situation exceptionnelle qui lui permet d’aller et venir sans tracasseries de l’administration française. Mais elle a l’air pourtant, comme dans son poème Funambule, de « marcher sur un fil », toute en pudeur et retenue. C’est une amie qui répond d’abord pour elle aux questions.

 Et puis, tel un grand frère protecteur, c’est Bruno Doucey, poète et éditeur, qui commence, tournant le mot « résistance » dans tous ses sens, avec ou sans majuscule, racontant comment pour lui, ancien directeur des éditions Seghers, coulées par des marchands, résister c’est écrire et c’est publier, en bilingue, de la poésie, d’hier et d’aujourd’hui, c'est faire vivre « les mots de résistance qui voyagent au-delà des frontières », cette poésie immortelle, si ancienne et si actuelle, parce qu’à jamais inachevée.

Alors les gorges se dénouent, et Roja Chamankar révèle sa force, l’énergie rebelle des mots de sa langue persane. Je ressemble à une chambre noire, annonce, en lettes d’or sur fond rouge tendre, le titre de son recueil, publié l’an dernier, et c’est en blanc qu’en quatrième de couverture est écrit :

« À nous
Les gants noirs et silencieux
À nous
Les mensonges faciles
À nous
Les exécutions en masse
À nous
La patrie en déroute
À nous
Les manches de couteaux
Tu sais
Ô combien le goût de l’eau est amer. »





Le dernier recueil de Bruno Doucey, à la couverture toute en nuance de bleus et de rose, vient de paraître. C’est pour Ceux qui se taisent que le poète donne de la voix : pour les habitants d’un village grec, pour un ami qui se meurt, pour une mère dans une cité de banlieue…

 « J’en pleure
Les quatre points cardinaux
ne lui suffisaient pas
Il a fallu
qu’il en trouve
un cinquième 


et qu’il enferme
cinq fois par jour
tous les horizons de sa vie
dans le corps d'une seule
femme vêtue de noir »

N’allez pas croire pourtant que l’univers de ces poètes soit tout entier envahi par la noirceur de notre temps. Ils savent aussi mettre en mots l’amour et la foi dans l’avenir de l’humain, comme tous les vrais résistants. Ecoutez donc  Bruno et RojaRoja et Bruno.
Ecoutez aussi Jeannine Perez, une de nos poètes nanterriens, qui a choisi de lire un texte écrit lors de visites de camps de concentration, après sa rencontre avec des survivants.



voir d'autres images des 11 et 13 mai


18 mai : des lumières d’hier pour dissoudre les monstres d’aujourd’hui et éclairer l’avenir…

La troisième et dernière soirée à P’Arc-en-Ciel, dans le cadre du Mois de la Résistance à Nanterre, sera la lecture-hommage, par la comédienne Eve Dadiès, d’extraits des livres écrits par deux Résistants déportés, qui n’étaient pas des écrivains, mais dont les mots et les actes sont de sublimes messages d’amour, de courage, de résistance :

   



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