Comme beaucoup de ceux
qui, à 20 ans, furent, de gré ou de force,
incorporés pour faire la sale guerre au peuple Algérien, André Meyer a mis longtemps à publier son
témoignage.
« Ma guerre d’Algérie,
1954-1962 » vient de paraître, alors que nous commémorons le 51e
anniversaire de l’indépendance de l’Algérie.
« Des crimes abominables ont
été commis par le colonisateur français. Ils resteront à jamais gravés dans ma
mémoire », accuse André
Meyer, qui condense, en 23 pages denses et percutantes, des souvenirs, des
images qui le « hantent encore aujourd’hui et presque chaque jour ». Repéré comme forte tête à peine
embauché, et vite renvoyé, de chez
Citroën, voilà le jeune ouvrier communiste appelé au service militaire en
Algérie, et affecté, en 1957, au « bataillon de Corée » :
« composé d’une majorité d’engagés auxquels s’ajoutaient des
« pro-nazis », mais aussi des délinquants et droits communs sortis de
prison, « les bérets noirs » avaient la haine…une haine envers le
communisme et les communistes. ». Tortures, massacres, pillages, viols… :
le témoignage est précis, douloureux. Que de ruses pour se faire porter pâle, pour
obtenir une perm’, pour, surtout, « n’avoir jamais tué ou torturé
un Algérien », que de chances pour échapper lui-même à la mort
quand il refuse d’obéir à des ordres… « Combien de fois, à
l’époque, ai-je pensé à fuir, déserter, m’échapper de ce cauchemar, de cet
enfer ? Ah ! si j’avais pu… D’un autre côté, pour des raisons
politiques, ma conscience m’imposait de tenir et de rester. En effet, le Parti
communiste français et la jeunesse communiste nous demandaient de mener au sein
de l’armée, un authentique travail contre la guerre, pour l’indépendance et
pour la paix.». Et André Meyer est un militant communiste convaincu !
Dès sa démobilisation, en 1959, il anime un
des premiers « comités antifascistes », organise grèves et manifestations contre la guerre, contre l’OAS,
participe bien sûr à la manifestation de Charonne, prend des responsabilités au
PCF. Le cessez le feu signé en Algérie, c’est le « soutien à la lutte héroïque » du peuple vietnamien,
puis les actions solidaires aux côtés de tant d’autres peuples opprimés,
victimes du colonialisme, de l’impérialisme , et aujourd’hui encore, c’est
le « Forum
pour un autre monde », collectif
dont l’infatigable André Meyer est l’âme ouvrière.
Le livre montre aussi au lecteur du
21e siècle ce qu’est le
communisme populaire à la française, de l’engagement dans la Résistance des
parents d’André Meyer, à son enracinement ouvrier dans les entreprises de
Boulogne-Billancourt et d’Issy-les-Moulineaux. Le livre se conclut par un appel
pour qu’il y ait « des historiens et des citoyens qui remettent en perspective
notre histoire à partir seulement des réalités des évènements, décisions,
prises de position… », que justice soit rendue à
« l’engagement si courageux et si désintéressé, parfois même au
péril de leur vie, de tellement d’hommes et de femmes sincères qui ont lutté
pour autrui (…) alors que tant d’autres fermaient les yeux ». Et
l’histoire n’est pas finie : André Meyer continue, avec nous, de l’écrire
au présent.
André MEYER, Témoignage MA GUERRE D’ALGERIE 1954-1962, 40
pages,
préface d’Hélène SIELKA, écrivain, journaliste, Chevalier des Arts et
des Lettres.
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